Conférence internationale de Rio sur l’environnement du 20 au 22 juin
2012 : les Nations s’apprêtent à signer
en totale inconscience les « Accords de Munich » comme en 1938,
sans voir que nous sommes à la veille de l’effondrement !
Le développement durable, c’est le
problème, pas la solution.
Cette cinquième conférence
internationale sur l’environnement sera la dernière : nous ne
serons plus là pour vivre la suivante, prévue en 2022 car dans les
10 années qui viennent s’accélèrera la PHASE FINALE DE L’AGONIE
TERMINALE et la plupart d’entre nous ne survivront pas à
l’écroulement des sociétés industrielles, qu’il s’agisse des
vieilles comme en Europe, ou des neuves comme au Brésil, en Inde ou
en Chine, ces pays immergés dans la ridicule imitation servile et
aveugle du faux modèle qu’est le mode de vie occidental.
Le mode de vie dont se targuent les
"races supérieures" qui se croient "la civilisation"
par excellence depuis 1756 (Mirabeau cité par Françoise Dufour) est
écologiquement impossible et humainement un échec car il ne mène
même pas au bonheur. La vie moderne n'est que régrès et mal-être
(hausse des suicides, hausse de l'usage de substances psychotropes
légales ou illégales, hausse des troubles psychiatriques). Les
"races inférieures" jadis nommées "sauvages"
sont depuis la fin des années quarante qualifiées de
"sous-développées" tandis que les "races
supérieures" se disent "développées". Les
civilisés font miroiter aux yeux du reste du monde leur prétendu
merveilleux mode de vie, ils décident de ce qu'est la mesure du
"niveau de vie" et distribuent les bons points aux
meilleurs élèves, ceux qui sortent plus vite de la "sauvagerie"
seront récompensés par l'appellation flatteuse de "pays
émergents", les autres, les perdants de la course au
"développement" ont encore la tête sous l'eau, ils
n'émergent pas. Ils sont immergés : on parlera de "pays les
moins avancés". Toujours le même racisme. Rien de changé
depuis les temps coloniaux. L'Occident fixe les règles du jeu. Un
jeu qui s'appelle "le développement" depuis la Résolution
198-3 de l'O.N.U. le 4 décembre 1948. Il fallait après la guerre
trouver une expression plus élégante que « pays arriérés »
encore très utilisée. Le Président Truman choisira les mots «
pays développés » et «pays sous-développés » dans son discours
du 20 janvier 1949 en précisant : « Plus de la moitié de la
population du monde vit dans des conditions proches de la misère […]
; sa vie économique est primitive et stagnante ».
Puis on remplacera « pays
sous-développés » par « pays en voie de développement » sans
même saisir l’outrecuidance extraordinaire de cette dernière
expression : ces pays n’ont même pas le droit de décider en toute
liberté de leur avenir, l’Occident définit d’emblée leur
destin, c’est le développement ou rien ! Pas question d’envisager
par exemple la stabilité, ou de trouver en eux-mêmes, en étant
fiers de leur propre histoire, leur propre culture, les clés de la
vie épanouie et agréable, sans tenir compte de ce qui se fait
ailleurs, par exemple en Europe ! Et ce développement obligatoire,
en plus, les occidentaux veulent désormais le faire « durer », le
rendre « durable » pour reprendre le pire mot choisi par certains
pour traduire « sustainable », alors que la seule urgence, au vu de
la dégradation accélérée des équilibres écologiques est
d'arrêter le développement. Il est absolument insoutenable. Il ne
faut pas simplement changer de "mode de développement", il
faut carrément se débarrasser du développement, donc surtout pas
le rendre "durable". Les races supérieures, les civilisés,
les développés doivent cesser d'inculquer au reste du monde leur
mode de vie suicidaire qui nous précipite tout droit dans le mur des
échéances écologiques, le mur de l'épuisement des ressources non
renouvelables liquides, gazeuses ou minérales, le mur de létalité
des pollutions de l'air, de l'eau, de l'alimentation, les plus graves
étant la pollution radioactive et celle conduisant au réchauffement
du climat et à l'acidification des océans. Il faut cesser de croire
à notre supériorité, arrêter de croire que nous sommes "en
avance", arrêter de définir nous-mêmes le sens de l'histoire,
de pratiquer le « vol de l'histoire » pour reprendre le titre de
l'ouvrage de Jack Goody (Gallimard 2010).
Le vers était déjà dans le fruit
lorsque le monothéisme nous a gonflé d'orgueil à la fois vis à
vis des "païens" et à la fois vis à vis des habitants
non-humains de cette planète. Et nous continuons à occuper tout
l'espace en détruisant tous les écosystèmes au point d'être
coupable de la Sixième extinction massive des espèces animales et
végétales. Nous ravageons la biodiversité. La masse des humains et
de leur bétail pèse déjà 90% du poids des 5000 autres espèces de
mammifères de cette planète ! Les 2000 biologistes qui étaient
réunis à l'Unesco en septembre 1968 pour tirer la sonnette d'alarme
sur la situation dramatique de la biosphère, disaient déjà tout
cela il y a 44 ans. Les mathématiciens du M.I.T., à la demande du
Club de Rome, démontreront début mars 1972 que si l'Occident
continue sur sa lancée et incite les peuples du Tiers-Monde à faire
de même, tout s'écroulera de façon catastrophique vers 2030. Début
2012, lors de la commémoration des 40 ans de ce Rapport au Club de
Rome au Smithsonian Institute à Washington, son principal auteur,
Dennis Meadows, a été encore plus pessimiste. Au vu des réactions
insuffisantes, non proportionnées à la gravité des faits tout au
long de ces 40 années, notamment l'échec des 4 Sommets de
l'Environnement : Stockholm 1972, Nairobi 1982, Rio 1992,
Johannesburg 2002, ce n'est pas en 2030 que le monde s'écroulera,
mais plus tôt : vers 2020.
A la veille du 5e Sommet de
l'Environnement, on ne peut que constater la tragique stagnation de
la situation : fin mai 2012 l'ambassadeur de l'Inde disait à la
sénatrice française Laurence Rossignol, coordinatrice du rapport
d'information du Sénat "Rio + 20" (www.senat.fr) qu'il
fallait que l'Occident arrête de vouloir brider la vitesse de
développement des pays tels que l'Inde, la Chine ou le Brésil, car
ces pays ne sont encore qu'en phase de rattrapage. Il ne fallait pas
utiliser l'argument de l'environnement pour handicaper leur
développement : « Laissez-nous d'abord atteindre votre niveau de
vie, et ensuite, une fois l'égalité atteinte et que vous nous
accueillerez au sein des Grandes Puissances, nous pourrons discuter
des moyens de traiter des problèmes d'environnement ».
Tragique stagnation car les
représentants des pays du Tiers-Monde disaient exactement la même
chose à Stockholm en 1972 aux européens et c'est alors que les
occidentaux décidèrent de satisfaire le tropisme mimétique des
jeunes nations décolonisées converties « à haute et intelligible
voix à la suprématie des valeurs blanches » (Frantz Fanon), en
accolant le mot "développement" dans le vocabulaire censé
traiter des problèmes d'environnement. On parlera de "développement
écologique" (écodéveloppement, Ignacy Sachs) puis à partir
de l'idée de I.U.C.N. et de W.W.F. en 1980, de "sustainable
development", du vieux français (1346) "soustenable"
qualifiant alors la bonne gestion de la forêt pour ne pas en entamer
le capital (ordonnance de Brunoy du roi Philippe VI de Valois).
Tragique stagnation car tant qu'on continuera à psalmodier comme
dans un mantra "développement, développement, développement",
par exemple cette "recommandation 3" parmi les 16 de la
Commission sénatoriale Rio + 20 parlant du « droit au même niveau
de développement pour tous » on continuera à nager dans la plus
inepte des illusions. Nous avons déjà en termes d'empreinte
écologique dépassé les capacités biophysiques de la biosphère
depuis 1983 (Meadows 2012 p.20). Déjà les nations les plus
follement consuméristes comme l'Europe de l'ouest et les U.S.A.
Devraient fortement réduire leur niveau de vie. Il est
mathématiquement impossible que le reste du monde se mette à vivre
ne serait-ce que selon le standard du mode de vie français : il nous
faudrait alors 6 planètes ! Voilà 40 ans que nous perdons un temps
précieux. Dès 1972 il aurait fallu casser le mythe du
"développement" et dire à Stockholm que l'Occident non
seulement s'excusait d'avoir pratiqué la colonisation, mais qu'en
plus cet Occident gonflé d'orgueil devait faire acte de contrition
et avouer que son idéal de vie était un non-sens, que son prétendu
"progrès" était un régrès, et que donc il demandait aux
peuples du Tiers-Monde de détourner leur regard du dit modèle
occidental, lequel est à défaire, n'étant qu'une monumentale
erreur, et de se ressourcer auprès de leurs propres traditions pour
retrouver les chemins de la dignité et de l'épanouissement. Plus
qu'un génocide (le quart de l'humanité d'alors en 1500 presque
totalement exterminé aux Amériques), la colonisation a généré un
véritable ethnocide à travers la prétendue "œuvre
civilisatrice" censée être "le devoir des races
supérieures"(Jules Ferry). Apporter la civilisation, le
développement, c'est introduire le complexe d'infériorité, c'est
infantiliser des peuples qui étaient jadis adultes et autonomes.
Dès 1972 il aurait fallu au regard des
conclusions des travaux des écologues démontrant le résultat déjà
dramatique du "pillage de la planète"(F. Osborn, R. Heim,
J. Dorst, R. Carson, B. Commoner, R. Dubos), faire la promotion de
l'ENVELOPPEMENT en lieu et place du DEVELOPPEMENT et inverser les
critères de valeur en saluant l'art de vivre écologiquement des
SYLVILISATIONS et en dénonçant la démesure (hubris) suicidaire et
l'orgueil raciste hallucinant de la CIVILISATION. L'enveloppement,
c'est l'art de vivre en se glissant discrètement dans les
écosystèmes, de façon à
laisser une place confortable aux
autres espèces animales et végétales. L'enveloppement, c'est ce
mode de vie modeste qui laisse toute la biodiversité s'épanouir en
symbiose avec l'espèce humaine. C'est un peu le "Buen Vivir"
issu de la vision quechua de l'harmonie qui a été récemment
intégrée à la constitution de l'Équateur. Au contraire du
développement qui n'est que l'étalement monodirectionnel et
anthropocentrique qui repousse jusqu'aux dernières extrémités la
vie sauvage, l'enveloppement est une figure repliée (et non dépliée,
déployée, étalée) pluridirectionnelle et biocentrique qui
multiplie les entrelacements et les circonvolutions, ce qui permet
une profusion d'interfaces et de points de contacts, une densité
d'échanges pour une vie sobre, frugale, débarrassée du superflu,
où les mots "riches" et"pauvres" n'ont plus de
sens, pas plus que l'obsession chez nous trimillénaire de
"puissance", mais où la convivialité et la tranquille
plénitude atteint des sommets. Le développement mutilait la
personne humaine en ne valorisant que la sèche et froide raison.
L'enveloppement rétabli l'être humain en sa complétude bigarrée
et baroque, (Michel Maffesoli), épanouissant tous les sens, laissant
s'exprimer les émotions, tempérant la raison par le modeste
raisonnable, bref ce qu'on appelle la sagesse, qui, en principe,
défini "Homo sapiens sapiens" ! L'homme biocentrique remet
les pieds (nus) sur terre et retrouve l'humus, donc l'humilité.
Décoloniser notre imaginaire, changer
de paradigme n'est pas un vain mot. Comme l'a répété Dennis
Meadows le 24 mai 2012 à Paris, "it's too late for sustainable
development". On a été trop loin, les dégâts sont déjà
trop importants, on ne peut plus jouer naïvement avec cet oxymore
ménageant diplomatiquement la chèvre et le chou. Au point où en
sont les choses, à moins de 8 années de la date fatidique, il ne
faut pas se contenter de réformettes ! Il faut révolutionner,
bousculer sans ménagement nos préjugés. Trop tard pour la
TRANSITION en douceur. Il faut basculer. Vite ! A quelques jours de
"Rio + 20", il serait totalement contre productif d'en être
encore à disserter benoîtement sur le "développement
durable".
La demi-journée de réflexion aux
Diaconesses à Paris 12e le 9 juin est dominée hélas par les
économistes. Mais où sont passés les biologistes, si actifs au
début des années 70 ? Les économistes ont vite fait de ne voir
qu'une "crise", encore une, là où il s'agit pour la
première fois du choc frontal d'ordre géologique entre une
civilisation occidentale entrain de contaminer dans sa
toxico-dépendance au consumérisme le reste du monde au préalable
décérébré par la publicité et le bourrage de crâne
développementiste et une fragile pellicule de vie mortellement
atteinte par cette mégamachine folle, coincée dans son
auto-accélération. La mégalomanie occidentale, que ce soit dans sa
version capitaliste ou sa version socialiste, nous précipite vers
l'implosion (P. Thuillier, D. Jensen). Nous ne serons jamais 9
milliards en 2050 ! (P. Chefurka, H. Stoeckel, C. Clugston). Des
famines dantesques auront lieu, bien avant, accompagnées de guerres
civiles, d'épidémies, d'émeutes et des raidissements
fondamentalistes qui vont avec. Illusion de revanche des peuples
humiliés lors de la Guerre de l'Opium et de la colonisation. Tout
cela dans une ambiance de folie guerrière avec des États ne
comptant plus que sur leur puissance militaire et leur capacité
cynique à anéantir les émeutes : la Chine s'apprête à doubler
son budget militaire ces 3 prochaines années après avoir augmenté
ses dépenses militaires de 189% de 2000 à 2010, la Russie de 82%
comme les U.S.A. (P. Larrouturou). Dans cette phase finale d'agonie
des sociétés industrielles, nous laissons encore stupidement les
publicitaires faire œuvre de crétinisation des masses, et les
riches jouer à leur concurrence juste pour leur plaisir infantile de
la frime ostentatoire : en jeter plein la vue, plaisir pervers,
pathologique, de rendre jaloux, parader comme des gamins et se donner
en spectacle aux ethnocidés des villes qui croient que le bonheur,
c'est l'enrichissement. Syndrome mimétique !
La justice, ce n'est pas l'égalité au
sens "tout le monde riche", c'est l'égalité dans la vie
modeste et rurale, moins de biens, plus de liens, la fin des
hiérarchies sociales par la multiplication des autarcies locales en
revalorisant les savoir-faire artisanaux et locaux, héritage de
l'ethnodiversité qui fait la valeur du patrimoine immatériel de
l'humanité que l'Unesco a raison de promouvoir en défendant le
pluriel des langues et des cultures, notamment les droits des peuples
autochtones reconnus enfin par l'O.N.U. en 2003. Cette justice, cette
égalité passe par l'éclosion des autogouvernements de petite
taille, seule possibilité d'amortir en souplesse (résilience) les
effets de l'effondrement des sociétés complexes (J. Tainter)
prétendues modernes et civilisées. Et le tout avec des moyens très
économes en énergie et ressources minières, des moyens basés sur
tout ce qui pousse et donc se renouvelle naturellement du seul fait
de la captation de l'énergie des rayons du soleil. Bref une vie
juste ne peut qu'être une vie à très faible empreinte écologique,
la seule dont le niveau est égalitairement partageable entre tous
les habitants humains et non humains de cette planète. Or sur notre
planète à taille finie, l'espace bio-productif utilisable est de 12
milliards d'hectares, soit actuellement 1,8 ha par personne, mais en
termes d'empreinte écologique, cette surface maximum est déjà
largement dépassée : 9,6 ha par habitant des U.S.A., 7,2 au Canada,
5,3 en France, 3,8 en Italie. Mais 0,8 en Inde et 0,5 à Haïti (S.
Latouche 2012).
Quelles décisions in extrémis ?
La rupture radicale pour orienter les
sociétés vers l'abandon du rêve occidental de puissance, rêve
déjà en place dans les premiers empires en Chine, en Perse et en
Égypte, ne pourrait résulter que d'un virage brutal et immédiat au
vu du peu de temps qui nous reste avant l'effondrement : demain tous
les publicitaires sont en prison, et tout ce qui distrait et
divertit, interdit. Les mass-médias se consacrent uniquement à
tétaniser les masses jadis abruties pour les désintoxiquer du rêve
stupide du consumérisme. Plus rien vient de loin. Arrêt immédiat
de tout véhicule, bateau ou avion à moteur thermique. Interdiction
des toitures non productrices d'énergie pour fournir en électricité
tous les habitants vivants en dessous ou à côté. Interdiction des
toitures non cultivables en petit maraichage sur terrasses : il faut
déminéraliser le paysage urbain en le revégétalisant.
Confiscation immédiate de tous les biens des riches pour financer le
retour à une vie besogneuse et décente tous les misérables
(dotation conditionnelle d'autonomie) et pour financer le
remplacement de
suite du nucléaire par les énergies
renouvelables et miniaturisables, y compris la remise à l'honneur de
l'énergie musculaire animale et humaine. Tout cela bien-sûr sans
envisager de faire la même chose, la même gabegie énergivore mais
dans un contexte de simplicité démocratiquement décidée. Arrêt
de l'usage des énergies fossiles jusqu'au retour à la concentration
préindustrielle des gaz à effet de serre...
Mais Bertrand Meheust explique bien
dans "Politique de l'oxymore" et "Nostalgie de
l'Occupation" pourquoi on ne prend pas le chemin de ce virage
pourtant absolument indispensable au plus vite pour éviter des
centaines de millions de morts. Si nous sommes effectivement tous
dans un gigantesque Titanic condamné au naufrage : ne faut-il pas
avant tout imaginer comment échapper à la noyade et mettre les
chaloupes à la mer ? Organisons-nous maintenant en multiples groupes
sécessionnistes pour basculer dans une vie totalement nouvelle et
jouissive, avec nos enfants formés dès aujourd'hui aux métiers
d'avenir : la vannerie, la poterie, le maraichage, la traction
animale et les petites manufactures municipales de recyclage des
métaux pour fabriquer des vélos...
C'est cela ou le "collapse"...
l'effondrement sanglant qui nous feront regretter les deux "petites"
guerres mondiales du XXe siècle.
Thierry Sallantin , juin 2012
militant écolo depuis 1967, présent à
l'Unesco en septembre 1968 lors du premier congrès mondial sur la
situation de la Biosphère; lauréat du Concours Général de
géographie en 1970; boursier Zellidja 1971 (Niger), puis ethnologue
amazoniste...
Ce texte est retrouvable dans une
version un peu plus courte et une bibliographie moins complète sur
la Toile, par exemple sur le site de "Netoyens" à la
rubrique "réfléchir" sous le titre : "Le
développement durable, c'est le problème, pas la solution."
Pour une version imprimable :
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imaginaire d'occidentaux ne jurant que
par l'AGER (guerre à la nature).
Nouvelles interrogations autour des
notions de SYLVA, AGER et HORTUS.
Exemples des agricultures Wayampi
(Guyane française) et Yanomami
(Vénézuéla). En ligne sur le site de
"morikido"
*Comment traduire "sustainable
development" ?*
J'habite à côté de la forêt de
Brunoy, un peu au sud de Villeneuve Saint Georges, cette forêt de
Brunoy que le roi Philippe VI de Valois voulait protéger et bien
gérer par *son ordonnance de 1346*, celle-là même qui est à
l'origine du concept créé en 1980 par les deux organisations
internationales de protection de la nature IUCN et WWF :
*sustainable development*
car ces deux organisations cherchaient
alors une expression un peu langue de bois, un peu contradictoire et
hypocrite pour dire "tout et son contraire" : à la fois
protéger et détruire la nature, à la fois favoriser l'économie
tout en favorisant aussi l'écologie, hypocrisie volontaire pour
plaire à tout le monde, se fâcher avec personne, ce qui est le
principe des expressions diplomatiques. En clair il fallait rassurer
les pays du Tiers-Monde, en colère depuis le première conférence
de l'ONU sur l'environnement, en 1972 à Stockholm, car ils ne
voulaient pas qu'on les bride dans leur espoir de se "développer"
au nom des mesures de protection de l'environnement. D'où le
stratagème alors choisit : caresser les Etats et le monde des
entreprises dans le sens du poil en fabriquant pour leur plaire une
expression qui contient leur mot-fétiche : "développement"...et
y accoler un qualificatif évoquant les impératifs écologiques de
la gestion prudente pour maintenir l'harmonie au sein des
écosystèmes...
Petite histoire du mot anglais
"sustainable",dont on remarquera les deux "s" =
sus. Il vient du vieux français utilisé dans ce texte de 1346 =
sous tenable, soustenir, avec deux "s", et en français
actuel, un seul "s" = soutenir, soutenable, soutenabilité
(sustainability). Le roi demandait à ses fonctionnaires appelés
"Maîtres des forêts" de bien gérer (to manage = ménager,
prendre soin) la forêt de Brunoy en établissant les quotas de
coupes de bois = ne pas couper trop, pour ne pas entamer le capital
de bois, laisser le temps à la forêt de repousser. Cette bonne
gestion, prudente et écologique permet de respecter la capacité
naturelle de renouvelabilité de la ressource en bois pour tenir
compte des besoins des générations suivantes. Ainsi la forêt
existera toujours, elle pourra se "soustenir", soutenir
perpétuellement, pour le bienfait des générations futures. Une
bonne gestion est une gestion soutenable.
Le mot "sous-tenir" signifie
à l'origine "tenir par en dessous", en prenant la
précaution de se placer exactement en dessous, pour avoir la charge
à porter, tenir, bien équilibrée au centre de gravité. Même sens
pour "supporter", porter par en dessous.
Donc dès le début ce mot fait appel à
une notion d'équilibre. D'où le sens actuel de "précaution
écologique", d'équilibre écologique...
Le 24 mai, conférence en anglais de
Dennis Meadows à Paris. C'est lui qui nous a raconté comment à 27
ans en 1972 il avait participé à la rédaction du fameux rapport au
Club de Rome que j'avais lu avec la passion de mes 19 ans à
l'époque;
sur internet en tapant sur google :
"le club de rome confirme la date de la catastrophe" et
aussi = "Is it too late for sustainable development" on
découvre les propos de Dennis Meadows tenus à Washington au
Smithsonian Institution le premier mars 2012, à l'occasion du 40e
anniversaire de ce fameux rapport = "The limits to Growth".
J’ai pu rencontrer Dennis Meadows juste après cette conférence,
on a sympathisé, il m'a donné son adresse. Il a expliqué à cette
conférence pourquoi il était hélas désormais trop tard pour
lancer le "sustainable development", car de toute façon
cette expression est contradictoire : il a expliqué que le
développement ne peut pas être soutenable. Il a précisé que pour
lui l'expression "sustainable development" est un oxymore,
ce que nous étions quelques uns, avec Serge Latouche (par exemple
dans la revue "Tiers-Monde n° 100) à dire dès la fin des
années 1980...
Seule la stabilité est soutenable, pas
ce qui se développe, croît, augmente, gonfle, grossit. Donc il faut
d'abord arrêter le développement. Et ensuite inventer des modes de
vie qui gaspillent moins : des modes de vie soutenables, à faible
empreinte écologique. Juste ce qu'il faut pour vivre, avec sagesse
et simplicité, ce qui est aussi le sens du mot français "se
sustenter", repris par la langue espagnole pour traduire
"sustainable". Les portugais aussi ont choisi de ne pas
dire « durable ».
Personnellement, je remplace
"développement" par "enveloppement". Cette idée
commence à se répandre : Edgar Morin et Michel Maffesoli
l'utilisent. Toute cette histoire pour dire que la bonne traduction
de "sustainable", c'est "soutenable" : ne jamais
dire pour traduire ce mot : "durable", adjectif qui plaira
au monde des affaires, troublé par le succès médiatique du Sommet
de Rio en 1992, bombe qu'ils cherchèrent alors à désamorcer en
rédigeant "l'Appel de Heidelberg" la veille du début de
la Conférence internationale à Rio. C'est pour cela aussi que début
juin 1992 les deux
hommes d'affaire Maurice Strong et
Stephen Schmidheiny créèrent le Business Council of Sustainable
Development, et depuis ce club des plus grosses multinationales aide
les plus gros pollueurs à se faire pardonner leurs crimes
environnementaux. Maurice Strong, pdg de sociétés canadiennes
œuvrant dans l'hydroélectricité et le pétrole est aussi depuis
1972 le Secrétaire Général nommé par l'ONU pour coordonner toutes
les conférences internationales sur l'environnement. Il a été
remplacé à ce poste fin 2010 par le français Brice Lalonde. C'est
lui qui a créé en 1983 dans le cadre de l'ONU la commission
"Environnement et Développement", et c'est à ce moment là
que les milieux d'affaire ont trouvé que l'astuce sémantique créée
par IUCN et WWF trois années avant : "sustainable development",
était une bonne expression pour réintroduire les priorités
économiques dans ces discussions sur l'environnement. Maurice Strong
placera à la tête de cette commission l'ancienne ministre de la
Norvège Gro Harlem Brundtland, et c'est par son rapport de 1987
"Notre avenir à tous" qu'elle rendra célèbre
l'expression "sustainable development". Quant à Stephen
Schmidheiny, président du plus grand groupe mondial spécialisé
dans l'amiante, il a été condamné en février 2012 à Turin à 16
ans de prison au grand procès italien des victimes de ce minerai aux
fibres cancérigènes. Préférer "durable" à "soutenable
est normal dans la logique managériale car pour ceux qui se soucient
avant tout de leurs bénéfices et vivent rivés au seul court terme,
ce qui doit durer, c'est la machine économique, elle doit continuer
à se développer le plus longtemps possible, pour que la
compétitivité des entreprises soit durable. Les francophones qui
cherchent d'abord des bénéfices durables utilisent désormais le
qualificatif "durable" à toutes les sauces, car il est
devenu un vocable indispensable pour faire du "green-washing",
une simple astuce dans les politiques de communication, une
coloration verte à la mode, l'art de se faire passer pour "écolo"
tout en faisant tout pour maintenir la rentabilité des
investissements, de façon "durable".
Le qualificatif "soutenable"
fait moins penser à la durée car il tient compte des impératifs
d'équilibre écologique pour que la pérennisation puisse se
dérouler en toute harmonie. Et ces impératifs sont complexes,
multi-factoriels, plein de boucles de rétro-action. Faire seulement
"durer", c'est bien plus simple (et simpliste !) : juste
continuer sur le seul axe du temps. Rien changer pour continuer à
faire des affaires. Coûte que coûte, durer, et faire taire ces
"écolos" qui osent demander aux tribunaux de faire payer
les pollueurs...
Dire "durable", c'est faire
injure à la langue anglaise qui possède le mot "durable"
dans sa langue et ne l'a pas choisi, préférant "sustainable",
qui a une longue tradition d'usage dans le vocabulaire anglais pour
traiter des sciences de la gestion des forêts. De plus lors de la
première parution en langue française du Rapport Brundtland "Notre
avenir à tous", éditions du Fleuve, Québec, en 1988, c'est
bien le mot "soutenable" qui avait été choisi.
C'est faire aussi injure à l'origine
française, attestée dans ce texte ci-dessous de 1346, du mot
"sustainable" (soutenable, soutenir, soutenabilité)
Voici le texte d'origine :
*Ordonnance de Brunoy, roi Philippe VI
de Valois, 1346*
*"Les Maîtres des forêts
enquerreront et visiteront toutes les forêts et bois qui y sont et
ferons les ventes qui y sont à faire, eu regard à ce que les-dîtes
forêts et bois se puissent perpétuellement soustenir en bon état."*
Thierry Sallantin
Lauréat du Concours général de
géographie, boursier Zellidja (Niger, Azaouak, Touareg), ancien
élève de Pierre Aguesse en écologie puis de Robert Jaulin et
Pierre Clastres en ethnologie. Ethnologue amazoniste…