jeudi 9 octobre 2014

Lecture de Science et Religion de Bertrand Russell


Bertrand Russell dans science et religion, fait un des premiers bon tour de la question en mêlant science, philosophie, et étude des avis religieux. Il aborde des problèmes complexes (rapport âme-corps, la perception, la conscience), avec une philosophie extrêmement claire tout en prenant en compte des auteurs réputés difficiles (Kant, Hegel) en n’hésitant pas a démystifié certains auteurs et idées.
Dans le ch. 1, Science et religion prétendent a la même recherche de la vérité factuelle, elle seront en conflit. Mais si la science conserve la question de la vérité et que la religion accepte son seul terrain morale, les conflits diminuerons. À cette fin la religion doit accepter de ne pas chercher à déduire la morale de croyance non-scientifiques. Dans les chapitres suivants Russell montre les méfaits des croyances religieuses sur différentes aspects : l’astronomie (ch.2), l’évolution (ch. 3), médecine (ch. 4), la psychologie [a travers le thème de l’âme et de la conscience] (ch. 5), la causalité (ch. 6), l’accès au savoir (ch. 7). Il rappelle aussi l’omniprésence dans la religion d’un finalisme (téléologisme, ch. 8), alors qu’il est possible de dissocier les idées morales, des descriptions scientifiques (ch. 9), enfin il conclue en montrant que l’apaisement de la religion n’est qu’un geste d’un mouvement qu’il souhaite plus général (ch. 10).
En astronomie, la religion chercher a conserver l’idée d’un aristotélisme et déisme anthropocentriste fort, qui place l’homme et « sa » Terre au centre d’un univers par ailleurs fixe, habité par des formes parfaites dessiné par un dieu ingénieur de l’univers. Copernic, Kepler, Galilée on du se battre avec le clergé pour leur opinions divergente (sans être pour autant athée).
En évolution, contre l’idée d’une création plus ou moins spontanée, jeune, crée dans sa perfection, l’idée de d’évolution s’applique à l’ensemble des sciences, en particulier : l’univers (Kant, Laplace), la géologie (Hutton) et les animaux (Buffon, Lamarck, Darwin).
En médecine, la religion à fait proliférer l’idée que les maladies peuvent être causée par le démon, la possibilité de soins miraculeux, et des traitements qui durcissent de l’exorcisme a la torture en cas de résistance du mal. Par ailleurs elle a considérablement combattu l’anatomie (en particulier la dissection), la physiologie (dont la circulation du sang), les « injections » visant a amoindrir les maladies (l’inoculation puis la vaccination) ou la souffrance (l’anesthésie). Au-delà de la condamnation des doctrines et des pratiques, elle a condamnée des médecins.
En psychologie, l’âme et son jugement son maintenu malgré leur critique par un matérialisme grandissant, pour des raisons de conservatisme moral (par Descartes et Kant notamment).
Des doutes sur la causalité, mettant en jeu le libre-arbitre et le déterminisme sont exposés a travers la physique quantique. Russell ne tranche pas, reste sceptique et canalise : « La recherche des lois causales […] est l’essence de la science ; par suite, dans un sens purement pratique, l’homme de science doit toujours admettre le déterminisme comme hypothèse de travail. Mais il n’est pas tenu d’affirmer qu’il existe des lois causales, sauf quand il les a effectivement découvertes : ce sait même imprudent de sa part. Mais il serait plus imprudent encore d’affirmer positivement qu’il connaît un domaine où les lois causales n’agissent pas. »
L’accès au savoir est différent pour la religion qu’il pense qu’une modification de la personnalité morale et physique est nécessaire, alors que le scientifique mettra en place une situation, proposera des instruments, sans pour autant exiger d’une personne qu’elle soit « réceptive », qu’elle pratique le jeûne, la méditation, des exercices respiratoires, voire prenne des drogues (elle peuvent produire des effets, des fragments de vérité, mais pas une source de sagesse générale).
Le finalisme religieux existe sous différente forme (donné dés le début, en progression constante, émergent), mais au vu du résultat, on peu se demander s’il s’agit vraiment d’une réussite, et c’est un faible réconfort pour ceux qui meurent de faim et de soif de savoir que Dieu a fait le meilleur des mondes ou qu’il est lui même le monde. Il est fort probable par ailleurs que l’histoire des vivants sur terre se termine non seulement pour les humains mais pour l’ensemble des vivants qui si déplacent tout simplement avec la fin de notre Soleil.
Dissocier les idées morales des descriptions scientifiques, voilà une des propositions afin de bien laisser continuer la science a oeuvrer, tout en permettant aux tenants d’avoir leur avis moral personnel. Russell insiste sur la distinction de preuve et de rationalité en science, alors que la morale userait du registre des sentiments pour se répandre.
En conclusion, la progression d’une religion libérée de tentations barbares par la science, n’est qu’un geste d’un mouvement plus général qui devrai s’appliquer aussi bien a la science qui parfois améliore la barbarie, mais plus encore a la libération d’une classe dirigeante internationale toujours en droit d’agir comme l’inquisition la fait sur les diverses opinions politiques et qui saura toujours se servir de la science avec arrogance et pour son propre compte.

jeudi 3 juillet 2014

Remarques sur le livre Radicalité, 20 penseurs vraiment critiques et sur la contestation en général.

Je viens de terminer la lecture du livre « Radicalité, 20 penseurs vraiment critiques », il m'a inspiré plusieurs remarques, certaines sur l'ouvrage lui-même, d'autres plus générales.

Pour donner de grandes lignes, je dirai que le livre dans son ensemble est intéressant et bienvenu pour sa visée pédagogique, mais que la présence, sous couvert d’axe critique disons, du progrès, d’auteurs clairement réactionnaires (Lasch et Pasolni a minima...), et d'un contributeur1 d’extrême-droite (Charles Robin) est un très mauvais point dans une maison d’édition militante libertaire.

Sur le livre. La couverture fait un peu viriliste, même si l'on peut y voir une réponse au livre « hémisphère gauche » qui présentait un cerveau, comme pour signifier qu'ici, la pratique prend une place prédominante sur l'unique réflexion.
Le titre lui-même, ne m'a pas rassuré, on peut avoir l'impression d'un « à qui pissera le plus loin » (20 penseurs vraiment critiques).
Le dos du livre met Gilles Deleuze, Alain Badiou et Toni Négri dans le même panier, ce qui déjà peut poser question, mais surtout il les considère comme des participants « au déploiement du capitalisme avancé ». Ce qui est un peu fort. Qu'on ne doute pas que les ambitions du collectif dans cet ouvrage soit différentes des leurs, qu'ils proposent des analyses différentes, et qu'ils se veulent plus critiques, on n'en doute pas. Mais ça ne devrait pas entraîner que ces auteurs, qu'on peut juger « réformistes », ou « alternativistes » n'avaient clairement pas pour ambition de participer au « déploiement du capitalisme avancé », ils auraient tout aussi pu bien dire qu'ils ont eu un raisonnement erroné, qu'ils se sont trompés, ont menti etc... Mais c'est différent. En même temps, cela rentre dans une critique que j'évoquerai plus tard, à savoir le manque de nuances, avec un étrange faux dilemme, soit avec nous, soit contre nous.

L'introduction essaie de faire un résumé général des critiques que l'on peut actuellement exposer, la critique des cultural studies notamment m'a paru intéressante, mais j'étais déjà traversé d'une inquiétude concernant ce qui allait pouvoir être défini comme « radical » car si l'on retient surtout le fait d'être en rupture avec le système, alors les créationnistes, tout comme les fascistes peuvent êtres retenus comme radicaux... Malheureusement ce n'est pas faux.
Par ailleurs les préfaciers affirment vouloir retrouver le sens de la limite. Or précisément, c'est une fois le sens établi que des limites découlent naturellement. Quand on a décidé vers où on voulait aller, logiquement, les limites apparaissent toutes seules.
La sélection des auteurs laisse à désirer. Et pas simplement pour des auteurs manquants faute de place. Je pense que la présence de Günther Anders, des Personnalistes Gascons (Bernard Charbonneau & Jacques Ellul), de Ivan Illich2, de Herbert Marcuse3, de Lewis Mumford, de François Partant, de Moishe Postone, de Vandana Shiva4 et de Simone Weil5 est bien vue, mais pour le reste c'est très discutable. D'autres auteurs, sur le même sujet auraient mérité leur place. Ormis Serge Latouche, que les éditeurs regrettent eux-mêmes de ne pas l'avoir mis (mais peut-être que cela aurait été possible, s'ils avaient viré quelques auteurs plus que contestables), on peut regretter l'absence du très polémique John Zerzan (courant anarcho-primitiviste), de Paul Virilio, de Alexander Grothendieck (de Survivre et Vivre) ou même simplement de Paul Feyarabend, voire Henri Lefebvre6. Cela si l'on voulait conserver l'axe critique du progrès avec quelques écrits en français. D'autres auteurs, nombreux aux Etats-Unis auraient été bien vus, précisément parce qu'on ne trouve rien en français sur eux. Je pense notamment à Steven Best du courant « total liberationism » ou des personnes du mouvement Deep Green Resistance comme Derrick Jensen.
Les justifications avancées concernent par ex. le manque de médiatisation7. Mais dire que Michéa manque de médiatisation, ce n'est pas sérieux. Michéa est chaque fois invité pour taper sur la gauche, tout en pouvant se prétendre d'une certaine gauche, et dans le même mouvement il ne dit quasiment rien de la droite.
Certains auteurs qui figurent dans les fiches de lecture, ne devraient à mon avis pas figurer dans une collection libertaire. Ceci étant peut-être dû à la perspective choisie, clairement indiquée comme reprise à Dwight Macdonald8. Je pense en particulier à Chistopher Lasch qui nous inflige une éloge de la famille, là où Richard Sennett (lui aussi dans les auteurs sélectionnés), rappelle pourquoi les conservateurs avaient tort sur ce point ; ainsi évidemment qu'à Michéa dont les pensées sont présentées d'une part par un auteur9 proche d'Égalité & Réconciliation10 et d'autre part critique de l'émancipation féministe et des mœurs à laquelle ont participé les révoltes de 1968 en la confondant avec une adaptation dont est capable le capitalisme pour survivre. Pour ma part, je reprocherai plutôt la fiche de lecture sur Michéa (car l'auteur pose en soit problème et que c'était visible à la lecture), que de ne pas avoir vu qui est Charles Robin qui l'a écrite (car il est vrai que traquer sur internet la vie de chacun n'est pas forcément la première des choses à laquelle des libertaires pensent, même si la stratégie confusionniste en nette progression peut justifier un regain de méfiance).
Je pense aussi aux auteurs psychanalysant, comme Dany-Robert Dufour.
Je n'ai pas compris l'intérêt de la présentation de Sfez, quant à Pasolini, j'ai quelques réticences que je ne peux pas étayer en l'état de mes connaissances, mais il me fait plutôt penser à une sorte de « rouge brun » (National Socialiste c'est-à-dire nazi) homosexuel, misogyne, critique du consumérisme et de la télévision, mais pas à un critique libertaire anticapitaliste.
Et je m'interroge, enfin, sur le fait que la présentation de Michela Marzano par Aurélie Puybonnieux évacue qu'elle soit une députée de centre gauche11 !

D'une manière générale, le point positif que je vois à l'ouvrage est sa volonté pédagogique (transmission de fiches de lecture, indications bibliographiques, citations paginées) et sa reconnaissance envers des auteurs, là où d'autres passent leur temps à critiquer comme s'ils ne devaient leurs connaissances à personne.
J'ai l'impression de retrouver une erreur (que j'avais vue une fois chez P.M.O. [Pièce et Main d'Oeuvre]) à savoir que la critique de la technologie faisant priorité, les autres types de contestations passent au second plan, permettant d'accueillir jusqu'aux textes les plus réactionnaires. Cependant, ce livre a la prétention précisément de présenter des gens qui prendraient les problèmes à la « racine ». C'est à se demander quelles mauvaises herbes exactement cherchent-ils à couper et à quel point la diversité du champ en question doit être grande pour que les auteurs y présentent des positions si différentes. Limite, Bernanos (auteur réactionnaire) pourrait y avoir sa place !
Espérons que cette mésaventure des éditions l'Echappée leur servira de garde-fou et que les prochaines publications n'en seront que meilleures.

Les éléments de réflexion que je me propose de partager maintenant me sont inspirés par une attitude que j'ai l'impression de rencontrer de plus en plus souvent chez ceux qui se présentent comme des « critiques » ou des « radicaux ». Je proposerai aussi un point sur ce que je pense qu'on peut qualifier d'idéologie confusionniste, et un retour à un problème classique : le sophisme naturaliste.

Depuis quelque temps je rencontre et lis des personnes qui ont plus une attitude radicale qu'un fond de radicalité.
Ils jouent à « qui pissera le plus loin » à travers leurs critiques, à « qui a la plus grosse », « qui dépasse qui » etc...
Par ailleurs, il est difficile d'émettre une critique sur leur avis, sans qu'ils te balancent illico, dans le camp opposé. En fait, ils ne semblent pas connaître la notion de mesure, ni de degré.
Je les vois aussi toujours chercher à avoir le dernier mot, comme si la discussion devait être « remportée », au lieu d'être l'occasion d'un partage et d'une rencontre. Ils n'expriment pas de questions, et encore moins de doutes sur leurs avis, souvent péremptoires.
Enfin (exception faite pour ce livre), ils ne font nullement preuve de pédagogie, considèrent beaucoup de choses comme forcément acquises, ou ne s'embêtent pas avec la transmission. Le partage affiché en devanture ressemble à une opération publicitaire, pas de rétribution, pas de reconnaissance. Nada.

La lecture de Michéa et d'autres auteurs du même genre permettent à mon avis de cerner réellement une idéologie confusionniste, et pas simplement une stratégie comme je l'ai vu un temps.
On y voit une négation des structures, qui sont aussi, ou encore, autoritaires, pour faire comme si tout le pouvoir s'était déjà restructuré sous la forme de réseaux (avec des nœuds plus concentrés que d'autres). Autant dire que la publicité, la hiérarchie dans les entreprises, la structure police-sénat-député-gouvernement12, et au final les classes sociales engendrées par les revenus différents n'existeraient plus. D'autres voient là une émancipation libérale-libertaire insuffisante, or il n'y a pas émancipation, ou usage moindre de la force, mais déplacement. C'est juste que le patronnat s'est approprié la puissance technique, rendant la question de la production moins humaine et la consommation et la propriété de plus en plus importantes.
Le libéralisme est pris pour un « progressisme », alors qu'il s'est toujours affiché en « objectivisme ». C'est-à-dire qu'il n'est pas du tout inscrit dans le libéralisme que les enfants ne doivent pas travailler, ou que les femmes doivent être aussi libres que les hommes. Si cela pousse dans ce sens « chez nous », c'est parce qu'il y a eu des luttes, et qu'il a du s'adapter. Mais si l'on regarde un temps soit peu à l'échelle du monde, on voit très bien que le libéralisme-réellement-existant se satisfait tout autant d'autres situations. Cela entraîne, chez les confusionnistes, un refus de la critique du patriarcat (avec une défense de la famille [critique de la possibilité du divorce], un refus de l'accès libre et gratuit à l'I.V.G., et une vision des révoltes de 1968 comme logique libérale) ainsi qu'une ambiguïté sur la question des cultures, qui sont vues unanimement comme une protection populaire contre le capitalisme, sans voir que certaines peuvent aussi couvrir des principes racistes et autoritaires quand elles sont cristallisées par une institution, alors qu'il y a diversité à l'intérieur même d'une culture (sur ces questions je renvoie à Martha Nussbaum, qui malgré tout, a su voir clair sur ces problèmes).
Ces dégâts sont réels, dans la mesure où, mêlé aux conspirationnistes, cela abouti à une nouvelle forme anti-juive mais non associée péjorativement au nazisme. Une tendance qui risque d'inspirer ceux qui sont en manque de repères.
Une telle pensée laisse aussi une place à l'attente d'un homme providentiel tout en mettant au point une forme nouvelle de culture (raciste et antisémite), qui se traduit comme une sorte de conscience venant prendre la place de la conscience de classe que les autres courants politiques n'ont pas su populariser.

Enfin je note un regain du sophisme naturaliste, cette tendance à confondre description et prescription.
D'abord avec la psychanalyse. La psychanalyse n'est pas une science. Elle n'a aucune base expérimentale d'une part, comme l'Histoire ou les Mathématiques me dira-t-on, mais d'autre part, elle n'a aussi aucune base conventionnelle, menant à des courants tous plus variés les uns que les autres, ou chacun y va de sa chansonnette. En tant qu'outil non-thérapeuthique, qui n'a pas pour ambition des préconisations sociales ou comportementales, cela peut s'entendre (juste une analyse de la psyché)... malheureusement, c'est bien souvent à d'autres choses qu'elle sert.
L'acceptation qu'une idéologie prenne le pas sur une description de la réalité entraîne aussi de mauvaises conséquences : négation de certains faits, éviction d'autres savoirs en désaccord avec l'idéologie.
Mais pour finir, je voudrais rappeler aussi sa variante scientiste : si ça fonctionne, c'est que c'est bon. Que c'est une bonne chose pour la société. Pas du tout. Ce n'est pas parce que le nucléaire fournit de l'énergie, ou que l'on peut obtenir des plantes par une modification génétique, que le nucléaire et les P.G.M. (Plantes Génétiquement Modifiées) sont une bonne chose. Alors, non pas pour des raisons scientifiques (toxicité), mais bien politiques : le nucléaire, c'est accepter la militarisation (et donc la négation de l'égalité de droit entre les individus) en cas de pépin, les P.G.M. c'est, bien souvent, le brevetage du vivant13. Ces indications ne concernent pas que les scientifiques, beaucoup de militant-e-s malheureusement se trompent de terrain (et souvent ne le maîtrisent pas) en avançant des arguments scientifiques, ils clôturent eux-mêmes le débat démocratique pour laisser la main aux experts.

Florian Olivier, Juillet 2014.
1Le contributeur Olivier Rey n'est pas d'extrême droite. Contrairement à une première version de cet article, et aux indications de Max Vincent suite à celle qu'a publiées Yves Coleman sur le site Ni patrie ni frontières (http://www.mondialisme.org/spip.php?article1990). Il ne doit pas être confondu avec son homonyme. Bien qu'ils aient des idées religieuses tous les deux, ce n'est pas le journaliste d'extrême droite décédé en 2012 qui a écrit la contribution au livre (Merci a « Rastapopoulos » de me l'avoir fait remarquer rapidement sur Seenthis).
2La contribution de Jean Robert est assez décevante (personnellement elle m'a même énervé). Je conseille à ceux qui en auraient l'occasion de lire plutôt l'article de Anne Matalon sur Illich dans le Dictionnaire des philosophes (dir. Denis Huisman), il est plus court et plus synthétique.
3La contribution de Patrick Vassort n'est pas mauvaise, cependant elle fait de Marcuse un sous-Günther Anders, tout en ayant toutefois fait ressortir un aspect spécifique de sa critique de l'autorité. Je conseille en complément l'article de Jean-Michel Palmier sur Marcuse dans le Dictionnaire des philosophes (dir. Denis Huisman), il retranscrit mieux certains avis politiques spécifiques, ainsi que les enjeux du courant freudo-marxiste et la position spécifique de Marcuse. Par ailleurs la bibliographie indiquée est plus complète.
4Dont on aurait aimé plus de détails ou d'exemples sur sa critique de la science.
5Qui aurait mérité plus d'informations sur l'aspect religieux.
6Auteur entre autres de Vers le cybernanthrope. éd. Denoël [Contre les technocrates - 1967] 1971.
7On peut lire aussi les remarques de Max Vincent sur ce sujet dans son commentaire sur le site de l’herbe entre les pavés. Sa lecture est intéressante. Cependant il fait un contre-sens sur Sennett, en disant qu’avec Marcolini on a une appréciation de la famille, alors qu'il en exécute une critique. Je ne peux cependant rien dire sur le livre sur les situationnistes de Marcolini, ne l’ayant pas lu, et appréciant de moins en moins l’IS (Internationale Situationniste) et sa mythologie. Ces autres lectures, sur Bauman, Lasch, Weil et Pasolini me semblent viser juste.
8Max Vincent, dans ses commentaires, a bien pointé le problème. Les auteurs présentent la ligne de Macdonald, mais oublient étrangement ceci : « Macdonald [...]constate que ceci “amène le radical à critiquer la doctrine progressiste dans des termes proches de ceux de la droite, d’où une bonne part de confusion”. On ne saurait mieux dire. Poursuivant sa comparaison, Macdonald avance alors que “contrairement au progressiste, le point de vue radical est sans doute compatible avec la religion”. Une indication pour le moins intéressante. Dwigth Macdonald, qui dit avoir évolué de la position “progressiste” à celle “radicale”, reconnaît trouver moins d’intérêt qu’auparavant à “l’action politique”. Ceci assorti du commentaire : “On devient souvent conservateur en vieillissant”.»
9Comme l'a remarqué « Paul », dans la retranscription de la 3e partie de l’émission de radio Vosstanie du 30
novembre 2013, que l'on peu trouver ici, http://mondialisme.org/spip.php?article2029. La discussion générale est intéressante, notamment sur la disparition de la prise en compte des rapports de classes (à l'exception de Marcuse et Postone qui reviennent dessus, même pour lui donner un sens différent, et il ne faut pas oublier que Ellul était aussi un grand connaisseur de la pensée de Marx), bien que j'ai de nombreux désaccords, notamment sur la qualification et le rejet de l'ensemble des auteurs sélectionnés, comme « anti-industriels ». D'une part ils ne le sont clairement pas (Zygmunt Bauman, Richard Sennett... sont très loin de l'être), d'autre part je pense qu'on ne peut vraiment pas tous les mettre dans le même panier de critiques du libéralisme (comme « Nico » le propose), alors que pour la plupart c'est clairement du capitalisme, et d'autres pouvoirs (patriarcat, exploitation écologique) qu'ils critiquent. Enfin le courant anti-industriel à mon avis, n'en est pas à faire une éloge de la tradition sur laquelle il faudrait s'appuyer, mais critique essentiellement la disparition d'un type de travail qui est l'artisanat. Cependant le regain de publications autour de Dwight Macdonald peut poser effectivement des questions, tout comme celles de Theodore J. Kaczynski qui bien qu'intéressantes à lire, posent une question en tant que publication valorisée par l'E.D.N. (Encyclopédie Des Nuisances) qui est militante.
10officine d'extrême droite qui fidélise sa clientèle chez les conspirationnistes, les perdus qui se laissent prendre par des discours volontairement confusionnistes, et des antisionnistes qui servent de paravent à une critique des juifs.
11Comme l'a remarqué « Paul », dans la retranscription de la 3e partie de l’émission de radio Vosstanie du 30
novembre 2013.
12Bauman, par ex. (mais il n'est pas le seul) pense que l'Etat n'a plus vraiment de pouvoir ou d'importance. Or précisément ils sont dans un jeu de collaboration avec le capital, en diminuant les taxes, en facilitant la destruction des droits sociaux, ou encore en retirant tous les impôts. Et remettre de l'Etat fort, comme l'appellent les réactionnaires, est loin d'être une solution : ce dernier étant avant tout une bande armée qui fera tout pour se maintenir elle-même et pour conserver ses privilèges.
13Ce qui se traduit souvent par un piratage des connaissances d'autres peuples que des scientifiques viennent confisquer. Comme le rappelle justement Aude Vincent dans sa fiche sur Vandana Shiva.

vendredi 21 février 2014

Éthiques dîtes de la "nature" ou de la "terre"

Les questions éthiques formalisée sur ce que nous appelons la nature sont une activité récente (dont on trouve une vision idéologique dans l’introduction du principe de précaution de Hans Jonas), mais la réalité d’une réflexion ou d’une inter-action spécifique avec elle est ancienne. On la retrouve à travers des aliénations religieuses, ainsi que des pratiques a travers l’activité des paysans, ou de métiers spécifiques plus tardif, issue de l’émiettement par le capitalisme en spécialisation productive comme l’agriculture, la foresterie, l’élevage...
D’autres cultures ont eu une relation différente, dans la mesure ou il ne désignait pas ce que nous percevons sous le terme de « nature », mais d’autres ensembles qui peuvent nous paraître proches. Nous les étudions aujourd'hui a travers ce que nous appelons l’éthno-écologie, du moins si cette dernière est elle même assez ouverte, pour ne pas attendre du terme « écologie » un savoir du type du notre, issus d’expérimentation dans des laboratoires, ou en tout cas de savoir fait pour circuler et être jugé entre pairs. Si ce n’est pas le cas, disons que d’une manière générale des cosmologies différentes, des conceptions du monde différentes existe et donne lieu a des représentations et des pratiques différentes. Un petit tour d’horizon a été notamment tenté par J-B. Callicott dans « Pensées de la terre » [Earth’s Insights : a Multicultural Survey of Ecological Ethics from the Mediterranean Basin to the Australian Outback, 1997].

Sur Éthiques de la nature, de Gérald Hess, Hess a cerné un panorama honnête de la discipline, et comme l’a remarqué Corine Pelluchon1, son goût pour le pluralisme moral, et un certain pragmatisme permet d’éviter une succession d’idées reçues sur chaque courant, qui se terminerai par la présentation glorieuse d’une dernière approche. Malheureusement l’exécution de l’exploration se fait aussi a travers un goût prononcée pour la phénoménologie qui, il me semble, a freiner tout approfondissement pratique des questions. C’est d’autant plus regrettable que l’auteur semble les connaître, mais il ne fait que les esquisser ici et là, sans délivrer de véritablement éléments de problématisation a un lecteur qui s’il ne les soupçonne pas, peu voir tout ce déballage conceptuel pour des fadaises intellectuelles, là ou le questionnement est pourtant important.
Pour donner un exemple, la question de la biodiversité n’apparaît tout simplement pas (alors que l’auteur a lu le livre de Virginie Maris sur la question par ex.). Pas plus que les conséquences d’une vision purement économique ou « croissanciste » de l’écologie. L’extension de l’urbanisme ? Les marées noire ? Rien. Quand a la question que pose certaines techniques (OGM, nucléaire, ou autre), elles sont évoquées... mais comme ça, sans plus d’intérêt. Tout cela alors que le livre Éthiques Animale de J.B Jeangène Vilmer, précédent livre du même type a la même édition et collection, censément donner la voie pour le type d’exposition attendu, lui ne s’est pas privé de tout une partie pour décrire les pratiques du milieu. Par ailleurs, on trouve en français, le livre « Éthique de l’environnement » de Joseph R. Des Jardins sur le même sujet et qui par a chaque fois d’un cas concret. Comme quoi un exercice proche n’est pas impossible.
Qu’on ne s’y trompe pas. On y trouve tout de même de bon éléments, qui viennent notamment relayé des présentation que l’on ne trouve pas en français (si ce n’est si on a lu la thèse de Virginie Maris) et sa connaissance de l’anglais, mais aussi de l’allemand, permet de sortir d’une réflexion francophone encore jeune sur la question.
Enfin les connaissances scientifiques de l’auteur sur le sujet n’apparaissent pas non plus. Et manque cruellement. Il n’y a aucun questionnement sur la méta-éthique, savoir de quoi il faudrait s’inquiéter est important, mais si on n’étudie pas la question de savoir comment partir de la vision qu’on les gens de ces questions pour leur permettre de l’approfondir, autant dire qu’on ne parle qu’entre philosophes. De même, rien sur l’éthologie, qui a pourtant beaucoup fourni sur ce que l’on entend en partie aujourd’hui par nature (au lieu de cela on trouve une petite inquiétante référence a Heiddeger qui a certes rappeler la pluralité des mondes... mais a aussi introduit l’idée d’une hiérarchie ou l’humain prend la première place dans les qualités de ces mondes.), et dont aucun auteur n’apparaît (Lestel, Frans de Waal par ex.).
Je dirai simplement que l’auteur présente donc, un travail intéressant, mais a compléter... et qui malheureusement risque de ne touché que ce qui rêve encore des philosophes-rois.

1http://www.laviedesidees.fr/Nature-et-pluralisme-moral.html

mardi 11 février 2014

Contre la surdité et actualité du scientisme et du positivisme




Scientisme et positivisme.
Le scientisme est l’idée selon laquelle la politique doit être réglé par la science, or c’est bien de cette question qu’il s’agit puisque sous couvert de dénoncé l’obscurantisme antiscience, on y amalgame aussi bien les critiques politique que les critiques du savoir scientifiques par des non-scientifiques.
De même le positivisme, consiste a croire que le « progrès » consiste dans l’addition de savoir (et ou de techniques, selon ce qu’on entends par science) les uns après les autres, de manière linéaire, comme si en enfilant n’importe qu’elle perles les unes derrières les autres, on obtiendrai le plus beau collier. C’est totalement rétrograde, et l’on aurait pu croire cette vision déchut depuis l’acceptation dans la théorie de l’évolution de l’image d’un buisson rond sans racine aux embranchement multiples. Forcé de constater qu’il n’en est rien.


En réponse à « Contre la peur », petit texte de Dominique Lecourt1.
Si l’on écarte les propos facilement retournable sur la politique n’utilisant que la peur2, le primat de la connaissance sur l’action3, ou le recyclage de l’opposition classique nature/technique4, le propos de Dominique Lecourt vise essentiellement a relativisé les questions et le savoir populaire sur la politique et l’éthique pour les enfermer en les amalgamant sous le sentiment de la « peur », peur qui elle même n’est que peu raisonnable, puisqu’il s’agirait essentiellement de trouver un objet a l’angoisse, qui par « nature » n’en a pas.

Dans ce monde imaginaire, les militants ne font que développer une « expertise ignorante », quand il ne sont pas « violent » (contre les nanotechnologies5). Ici Lecourt pratique l’amalgame entre la science, la politique et la morale. La science, ne dit pas, et n’a pas a dire ce qui doit être dans la société. Elle fournie une description et des moyens. C’est a la politique de trancher sur ce qui est bon ou mauvais, la science se contente de s’accorder sur la vérité.
La science n’est pas une opinion parmi d’autres. La science, n’est tout simplement pas une opinion. Ce sont des propositions validées pour leur véracité, pas pour leur bien, ou la justice. L’opinion c’est a la population de la donner sur ce qu’elle pense bon ou mauvais. Sur cette question les experts n’ont rien a dire.
Le problème c’est que ne sont retenus comme argument politique, que les discours des experts. Ainsi, il y a interdiction ou moratoire, que pour des raisons sanitaires appuyé sur publication. Enfin en théorie, car en pratique, une interdiction du Redbull pour sa Taurine peut-être annulée, non pas pour des raisons scientifique qui prouverai que c’est bon, ou sans effet négatif sur la santé, mais parce que l’interdiction coûte trop chers dans le cadre d’une « concurrence libre et non faussée » qui fait payer un choix politique qui ne lui convient pas.
Ainsi, les OGM, pourrait très bien être refusés pour des raisons politiques d’opposition au brevet sur le vivant. D’autant plus qu’il est évident que l’on ne peux pas demander a l’ensemble de la population de connaître toute la littérature scientifique sur les OGM.
Mais l’essentiel du propos serait surtout de rappeler que si la science produit un savoir particulier, qui ne peut pas être ignoré, sur ce que les choses sont, la population en produit un autre sur quels choses seront acceptés ou refusée dans la société. Chacune est légitime dans son domaine.

Au sujet de « L’avenir de l’anti-science », texte de Alexandre Moatti6.
Le texte de Moatti, peut-être par sa longueur, est plus fin que celui de Lecourt, surtout il propose une description historique ou des observations de mouvement idéologiques, cependant la critique normative (qui prétend donc a l’actualité) en transpire clairement7.
Par exemple Rousseau est cité comme un critique de la science ou de ses applications, alors qu’il s’agit de critiquer le pouvoir de la science sur les questions morales et pas sur son propre champs8. Ce déplacement permet de nier, toute remise en cause politiques de certaines techniques ou programme de recherche, vous ne faîte pas là une réflexion politique, mais de « l’anti-science ». Ingénieux.
Moatti nous ressert la critique d’une science citoyenne qui s’incrusterai dans le CNRS, très bien, dans la même veine, pourquoi ne pas critiquer le budget de l’État et des Industriels ? En quoi l’influence des uns serait un problème et celle des autres une nécessité ?
Si jamais vous vous aventurez a dire que vous n’êtes pas contre le principe de la science, mais contre le brevet, ou que vous voudriez que la science vous aide a mettre au point des techniques et savoirs que vous pourrez produire et reproduire vous même, avec les matériaux locaux, renouvelables, vous êtes dans l’anti-science (avec les religieux, les obscurantistes, les dogmatiques), ou dans la peur (avec les réactionnaires et les irrationnels). Au choix.

L’avenir pourrait pourtant être compris avec l’idée que la science ne se résume pas forcément à la connaissance du trafic routier, mais qu’elle pourrait aussi bien donner a connaître pour ceux qui n’ont pas la voiture. Il ne s’agit nullement de promouvoir a nouveau le lyssenkisme et sa science prolétarienne. Il ne s’agit pas de dire du trafic routier, comme Lyssenko disait de la génétique qu’elle est fausse. Pas du tout. Mais qu’inévitablement et bien heureusement pour le pragmatisme, que la science sert, reste a voir et définir, qui elle doit et comment elle peu servir a l’émancipation.



Florian OLIVIER, 10 Février 2014
1http://iphilo.fr/2014/02/08/contre-la-peur
2La classe politique, utilise bien sur la peur, mais pas seulement, elle fait aussi miroité des promesses, de l’avenir. Du progrès. Il suffit malheureusement d’entendre les multiples prétentions sur la baisse du chômage, ou le temps des cerises qui se rapproche soudainement à la seule décision sur la classe dirigeante que la France a bien voulu laisser a sa population, les élections.
3Loin de l’affirmation selon laquelle la connaissance prime sur l’action, Canguilhem (que Lecourt n’ignore pourtant pas) indiquait que la science naissait de l’action, d’une action qui cherche sa réussite, la où la première fois elle avait échouée.
4Alors qu’aujourd’hui précisément on nous vent a renfort publicitaire une alliance « technique/nature » avec éolienne industrielle, panneau photovoltaïque, géo-ingénierie contre le changement climatique, et technique imitant ou s’inspirant de procédé observé « dans la nature » pour les reproduire avec des nanos. Cette opposition est un artefact intellectuel du a la culture occidentale, que Descola a proposé de qualifié de « naturaliste ». La nature est une production conceptuelle de notre culture. Ou pour le dire avec une perspective darwinienne, comme probablement l’ensemble des mammifères qui nous ressemble, nous sommes susceptible de mettre au point une culture.
5A ce petit jeu, il faudrait indiquer l’article de Bernadette Bensaude Vincent qui indiquait que ces « débat » était clairement technocratique, organisé selon les industriels locaux, sans soucis des questions que pouvaise se poser les personnes localement, et que par ailleurs, il se faisait alors que toutes les décisions avait déjà été prise de production, et que les budgets des nombreuses entreprises était validé. Mais qu’est ce que la violence ? Refuser un faux-débat, ou mentir a la population en lui faisant croire qu’elle est souveraine alors que tout a déjà été décider ?
6http://www.institutdiderot.fr/?p=4978
7Sans parler des étiquettes comme « néo-anarchiste » dont en France, seul Onfray prétend parler, et alors que celui-ci s’est toujours affirmé prométhéen. Il s’agit malheureusement d’une méconnaissance du mouvement anarchiste réel. Je suis prêt cependant a toute citation d’une motion de la Fédération Anarchiste, ou de la Coordination des Groupes Anarchistes qui critiquerai la science. Et pour cause : il n’y en a pas. En général ces idées sont qualifiée : d’anti-industrielle en référence surtout aux éditions de l’EdN. Et leur diversité est loin d’être résumable a un « néo-anarchisme ». Ainsi on trouve une critique culturelle, voire religieuse, de « La technique » chez Ellul, Illich et Dupuy. Une critique néo-luddite, chez PMO et plus ou moins dans N&MC. Quand au groupe Oblomoff, si l’on lit bien son livre, le critère mis en avant et « le sens commun », comme Orwell. Enfin pour faire un panorama bref, un dernier courant pourrait être qualifié de primitiviste, il est complètement mineur et totalement rejeté en France (et pour de bonne raisons !). L’extrême droite elle à trouvé son terrain en détournant le mouvement culturel du « survivalisme » vers elle (surtout en Italie), comme elle a su le faire avec le conspirationnisme.
8Il le rappelle pourtant clairement dans l’intitulé de l’Académie de Dijon : « Sur cette Question proposée […] : Si le rétablissement des sciences et des arts a contribué à épurer les mœurs. ». Ceux qui voudront s’en persuader peuvent toujours lire l’excellent texte de Rousseau.