jeudi 15 septembre 2011

Quel imaginaire cultiver pour sortir de l'industrialisme ?


Du vendredi 11 novembre 2011 à 13h00 au dimanche 13 novembre à 15 heures, l'association la ligne d'horizon, organise un colloque « sortir de l'industrialisme » à Lyon.
http://www.lalignedhorizon.net/wikka.php?wakka=Actualites
J'ai été invité pour intervenir, notamment sur la question Quel imaginaire cultiver contre l'industrialisme ? Il fallait pour cette occasion proposer avant le 15 Septembre un petit texte d'introduction. Comme j'ai toujours un peu de mal avec ce genre de chose (je m'en sors mieux a l'oral qu'a l'écrit), ça n'a pas été évident. Le texte était limité à 7000 signes maximums. La version lisible ici, en fait a peine plus (c'est du aux références bibliographiques que je fais apparaître). Si vous avez l'occasion d'y venir, il n'y aura que du beau monde, de ceux que je connais pour les avoirs lu ou rencontré : Jean-Marc Luquet, Bertrand Louart, Jocelyne Porcher, Jean Monestier, Denis Deun, François Jarrige, Alain Gras, Samuel Foutoyet, Clément Homs. Autrement dit, toute une partie de la fine fleur de feu decroissance.info, de sortir de l'économie, et des critiques actuels des techniques industrielles.
Quel imaginaire cultiver pour sortir de l'industrialisme ?

La sortie de l'industrialisme constitue pour tout une frange de la population (UMP, PC, revalorisation du travail, relocalisation des industries), y voyant l'assurance possible d'un salaire pour accéder à ce que le capitalisme leur à confisquer, à un désastre. Pourtant si l'on veut s'assurer des sociétés locales fédérées solides (résilientes1) et ouvertes qui nous permettrais de vivre bien et durablement, avec des conflits2 certes, mais pas de désastre majeurs, nous devons pouvoir œuvrer, faire en sorte que chacun puisse être artiste ou artisan de sa vie, être libre. Pour cela nous devons nous libérer d'une vie standardisée, exploitée et contrainte a un soutient silencieux d'un probable écocide.

Il y a principalement un problème majeur auquel se confronter et deux perspectives à éviter. Le problème que l'on va rencontrer est un pur produit de l'industrie de la propagande : l'acculturation, l'aliénation et au final le nihilisme. Les perspectives problématiques sont l'individualisation de la culpabilité menant à une société ouverte mais fragile, et l'enfermement entre nous dans une société solide mais carcérale.

La propagande qu'elle soit claire ou déguisé, affiché, télévisé, écrite, orale ou situationnelle a l'échelle industrielle est désastreuse3. Non seulement elle engendre un problème disons de bordure qui instaure des individu-e-s sérialisé-e-s qui réclame cette propagande. Mais surtout, elle transmet non pas la culture, mais l'obéissance, la soumission à la répétition générale, l'idée qu'il n'y a pas a discuter, mais juste a « écouter ». C'est l'acculturation.
Le choix, la participation de chacun est anéanti sous le prétexte qui s'exprimerait par nos achats ou leurs absences. Si jamais quelqu'un s'imagine participer, apporter quelque chose, il y aura toujours un expert pour répondre à votre place. Et de multiplier les domaines et les moyens ou la parole ne nous sera plus possible ou les relais, les médiations seront incontrôlable tout en prétendant parler pour ceux qui ne le peuvent plus. Au final chacun par un système organisé pour que nous ne puissions plus y prendre part, est contraint de suivre et de demander même a ne pas être exclus de ce système qui a pris soin au préalable de détruire ce qui aurait permis d'autres types de vies. C'est l'aliénation.
Le stade ultime étant la hantise par chacun du sentiment que l'on ne peu pas faire autrement, et qu'après tout, il n'y a qu'a s'accommoder de tout cela. Que le meilleur n'est que celui qui s’investit, et s'adapte le mieux au système. C'est le nihilisme. A ce problème peu s'esquisser des propositions dangereuses et autoritaires :

Les libéraux pour qui le problème est surtout individuel. On reconnaîtra la diversité des vies, mais on fragilisera chacun : il s'agira d'ordonner de prendre le vélo4 au lieu de la voiture au niveau du gouvernement. Mais au niveau des personnes, le discours existe aussi : on critique celui qui a une voiture, celui qui a un portable, celui qui a une télévision. Se faisant, on passe à côté de l'essentiel : un problème collectif, organisé avantageusement par un système pour une oligarchie d'expert et de marchand. Chacun vit comme il peu dans ces contraintes, avec plus ou moins de cohérence, c'est un problème personnel, mais la question importante est politique : comment combattre ce système ?
L'autre perspective malheureuse c'est une réaction inverse a la fragilité organisée, en demandant une organisation solide mais carcérale. C'est l'extrême droite, qui propose de dicter une identité nationale ou régionale a la place des identités personnelles, qui va clôturer les frontières, nationaliser les banques. Il s'agit d'exalter aussi un paganisme et un droit de nature qui sera répercuté par les personnes comme une déification d'une « nature » idéalisée accusant tout ce qui ne lui convient pas d'être contre-nature, inauthentique, imparfait ou impur.

Nous devons, pour faire face a la propagande industrielle, nous aussi dès aujourd'hui être capable de proposer un imaginaire simple, mais de manière non-autoritaire. Cet imaginaire est nécessaire mais non suffisant. Il doit être pratique : être partageable avec les plus jeunes comme les plus âgés. Toutefois, l'imaginaire et la connaissance n'ont jamais empêcher le pire. Il faut pratiquer, expérimenter, s'organiser.
Il s’agirait de partager des connaissances et savoir-faire émancipateurs et de renouer avec des expériences originales pour anticiper et tester une organisation avant que les destructions les rendent impossible ou que nous en soyons réduit à reproduire les mauvaises que nous avons eu l'habitude de pratiquer.
Mais le mot d'émancipation, ou d'autonomie est confus, sans plus de précision, il n'est qu'une esthétique fuite en avant. Qu'es ce que cela veux dire ? Il s'agit de se libérer de la croyance en l'indépendance totale ou en l'État fort salvateur pour renouer avec la conscience de dépendances, choisir celle qui nous sont favorable, et les entretenir5.
Les quelles nous sont favorables ? La logique classique entretient sur cette question une double opposition. Celle des libéraux qui s'attache a l'idée du moindre mal, et celle des communautariens qui s'acharne à définir un bien commun autoritaire6. Une autre perspective désirable est pourtant possible : tout le monde sera d'accord pour dire que chacun doit pouvoir établir ce qui est bien pour lui, alors pourquoi ne pas entretenir les conditions qui permettent à chacun de l'établir ? Le bien commun sera en quelque sorte paradoxalement celui qui permet à chacun d'être libre de définir ce qui est bien pour lui.
Pour porter cette logique, il faut construire établir un imaginaire ou l'humain n'est qu'un élément d'un tout vivant et non vivant qui lui permet d'exister7. Il ne s'agit pas pour lui de s'y laisser porter (ce serait la loi du plus fort), mais à l'intérieur de cette cosmologie de porter l'attention sur un ensemble de conditions (biologique, psychologique, contextuel, capacité). Pour les esquisser rapidement, il s'agirait de ralentir et de relocaliser pour restaurer les conditions de la perception, de la réflexion et de la reprise en main de ce qui nous arrive.
De préserver les conditions qui permettent l'entretient d'une diversité biologique8 ainsi que l'accès libre a l'eau, a la terre, a la possibilité de se loger et de manger.
De détruire le système aliénant (par la manifestation, l'anarcho-syndicalisme, l'action directe), au lieu de penser qu'il suffit de faire à côté ou d'attendre que la grise s'aggrave alors que ces exactions sont longues, quotidiennes et qu'a terme elles nous empêchent de faire mieux.
Et enfin d'autogérer et d'autoproduire les besoins dont les conséquences n'empêcherons pas les possibilités précédemment établie comme juste et nécessaire.

Florian OLIVIER
1Rob Hopkins, Manuel de transition, de la dépendance au pétrole à la résilience locale.
2Miguel Benasayag, Éloge du conflit, avec Angélique del Rey.
3Voir : Verbicide et Storytelling de Christian Salmon, Propagandes de Jacques Ellul, De la misère humaine en milieu publicitaire du groupe Marcuse, et le recueil divertir pour dominer par offensive.
4La ministre Christine Lagarde en 2007 a ceux qui trouvait l'essence trop chère.
5Voir Martha Nussbaum, ou Marlène Jouan, Sandra Laugier, dir. , Comment penser l'autonomie ? Entre compétences et dépendances.
6Libéraux et communautariens, par André Berten, Pablo da silveira et Hervé Pourtois.
7John Baird Callicott, Éthique de la terre.
8Virginie Maris, Philosophie de la biodiversité.

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